Quand Nicolas Barré se met à prévenir le peuple des dangers de la « tyrannie » que représentent les Gilets Jaunes.
Les pauvres, « ceux qui ne sont rien », sont merveilleux.
Notamment quand ils feignent d’être contents de travailler pour Uber ou
n’importe quel autre boulot précaire, quand ils servent à vanter les
« micro-entreprises », quand ils servent à justifier et légitimer les
baisses d’impôts pour les grandes fortunes et les entreprises du CAC40.
Il en va tout autrement quand ils décident « de l’ouvrir ». Et surtout
quand cela dure plusieurs mois !
C’est alors que les journalistes libéraux, qui d’habitude tentent de
se montrer raffinés et nuancés, aux airs d’agneaux, révèlent ce qu’ils
sont vraiment en sortant leurs griffes de loups féroces, ouvrant leurs
gueules puantes mais menaçantes aux dents pointues, bavant de rage.
Ainsi, l’éditorialiste des Echos Nicolas Barré, dans un édito intitulé « Ennemis du peuple »
(ni plus ni moins) se livre à un exercice d’indignation et surtout de
haine de classe contre les Gilets Jaunes suite à l’Acte XVIII.
Se faisant l’écho de la ligne gouvernementale, l’objectif principal
de Barré est de pointer la « violence des casseurs » tout en rendant
« complices » des dégradations sur des restaurants et boutiques de luxe
sur les Champs-Elysées l’ensemble des Gilets Jaunes mobilisés. Au-delà
de la discussion sur la pertinence ou non de ces actions de certains
manifestants, cet amalgame vise clairement à légitimer et justifier la
répression et la violence policière contre l’ensemble des personnes
mobilisées. Car pour Barré les Gilets Jaunes qui restent mobilisés
depuis quatre mois sont des « radicalisés » : « Un samedi, c’est la
tombe du soldat inconnu qui est vandalisée. Un autre, ce sont les Juifs
qui sont pris à parti. Là, ce sont des restaurants, des banques, des
boutiques et même des kiosques à journaux qui sont pillés. On a basculé
dans la radicalité, loin, très loin de toute forme décente de
contestation sociale ».
Face à cette situation l’éditorialiste s’excite sur les nouvelles
dispositions répressives que l’on pourrait adopter pour « mettre hors
d’état de nuire » les « ennemis du peuple ». Ainsi, il suggère un
contrôle accru sur les réseaux sociaux : « on est en droit de s’interroger sur le rôle des réseaux sociaux dans une violence qu’ils contribuent à décupler ». Conscient de la violation au droit d’expression que ces propositions impliquent il affirme que le net est un « terrain neutre sur lequel ces voyous font le marketing de leur haine puis celui de leurs exploits ». De vrais enragés pour qui « il faut du feu, de la fumée noire, du sang ! ».
Mais les réseaux sociaux qu’il est question de contrôler sont aussi
un terrain favorable pour les complices de ces « voyous » : « D’autres,
la mine ravie, multiplient les selfies imbéciles devant un restaurant
en flammes pour pouvoir dire « j’y étais ! » Au micro du journaliste,
quand ils ne le prennent pas en chasse, ils expliqueront plus tard
qu’ils sont contre la violence ». Sentant déjà que l’éditorialiste commence à être en roue libre, animé par le mépris de classe, on lit : « [ils
affirment] qu’ils n’ont rien à voir avec les black blocs. Rien à
voir... mais ils ne sont pas les derniers à remplir leur sac de montres
de luxe, de chaussures ou de ballons du PSG dans les vitrines dévalisées ». Et indigné, envahi de rage, il nous interpelle : « Et ce sont ces gentils idiots que l’on devrait écouter pour définir la politique du pays ? ».
Le discours de fond que Nicolas Barré livre dans son édito est le
même que celui du gouvernement. En effet, Benjamin Griveaux, le
porte-parole du gouvernement, affirmait la même chose quelques heures
auparavant : « Quand je vois des gens autour des saccages qui, sans
se montrer responsables de départs de feux ou d’actes criminels
encouragent la violence, il y a une part de complicité. Je pense aussi à
toutes ces personnes qui font circuler des messages sur les réseaux
sociaux. Ils encouragent et avivent la haine ».
Ce n’est évidemment pas un hasard. Mais le ton haineux et rempli d’insultes et de mépris de classe de l’éditorialiste des Echos,
qui n’hésite pas à traiter les Gilets Jaunes de « gentils idiots », de
« voyous », « d’imbéciles », exprime aussi l’exaspération des classes
dominantes face à un mouvement qui perdure et qui expose la vraie misère
et précarité de millions de personnes dans le pays. Un mouvement qui
est devenu un obstacle de taille pour l’agenda ultralibérale du
gouvernement et du grand patronat. Un mouvement qui a mis dans la rue
des milliers de « ploucs » qui énervent et donnent la nausée aux « gens
bien » et raffinés, aux « éditorialistes respectables ».
Mais le comble de l’édito de Barré est sa tentative de faire passer
les Gilets Jaunes pour les « ennemis du peuple » et lui comme étant du
côté du peuple. « Quand une foule haineuse se prend pour le peuple, c’est le début de la tyrannie »,
écrit-il. Mais on pourrait se demander, dans cette affaire, qui sont
les vrais « haineux » qui « se prennent pour le peuple » ? Les « gentils
idiots » ou l’éditorialiste obnubilé par sa détestation du pauvre ?
Quant à la « tyrannie » il faudrait surement la chercher du côté d’un
tel « Jupiter » et de ses complices.
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