Jusqu’à
présent une victoire du candidat du PT (Parti des Travailleurs) au
second tour face à l’extrême-droite semblait le scénario le plus
probable. Mais les derniers sondages qui créditent Jair Bolsonaro à plus
de 30% des intentions de vote montrent que sa victoire est en réalité
possible. Et cela d’autant plus que, depuis quelques jours, des soutiens
du candidat du PSDB (droite), Geraldo Alckmin, font défection pour se
ranger derrière Bolsonaro. Le pouvoir judiciaire entre, quant à lui
aussi, dans le jeu électoral pour favoriser le candidat
d'extrême-droite.
A quelques jours du premier tour, Bolsonaro accroit son avantage dans les sondages
Lundi, l’institut Ibope publiait un sondage accréditant Jair
Bolsonaro, le candidat d’extrême-droite se revendiquant de la dictature
de 31% des intentions de vote au premier tour des élections
présidentielles ce dimanche, soit 4 points de plus que jeudi dernier.
Haddad, candidat du Parti des Travailleurs, remplaçant de Lula
incarcéré, pour sa part stagne avec 21% d’intentions de vote.
Plus inquiétant pour le PT, la proportion d’électeurs excluant de
voter pour son candidat a grimpé de 27 à 38%, alors que pour Bolsonaro
elle se maintenait à 44%. Au second tour, le sondage prévoit les deux
candidats à égalité avec 42% des voix, tandis que Haddad l’emportait
(42% contre 38%) jeudi dernier.
Un autre sondage publié dimanche par l’institut MDA donnait Bolsonaro
à 28% d’intentions de vote et 25,2% pour Haddad. Dans les deux cas, les
derniers sondages publiés donnent Bolsonaro en tête au premier tour
avec une progression des intentions de vote.
Malgré un taux important de transfert de voix de Lula vers Haddad, ce
qui est certain c’est que le PT peine à progresser dans les régions du
sud et du sud-est même s’il maintient son avantage dans les régions
populaires du Nordeste qui votent traditionnellement pour le candidat du
PT.
Une partie des classes dominantes a penché pour Bolsonaro ?
Ce renforcement du candidat de l’extrême-droite est dû en partie au
fait que ces derniers jours il a reçu le soutien explicite ou tacite de
certains secteurs des classes dominantes liées au pouvoir judiciaire ou
aux grands médias, sans parler de la réaction positive des marchés suite
à la publication des sondages favorables à Bolsonaro.
En ce sens, en réponse à la mobilisation des femmes au Brésil
pour dire non à Bolsonaro, l’épouse du juge Sergio Moro chargé de
l’enquête anticorruption Lava-Jato, entre autres contre l’ex-président
du PT Lula, a publié sur son profil Instagram un post contre le
mouvement des femmes tout en appelant à voter le candidat réactionnaire,
arguant qu’il ne fallait pas voter pour un « bandit », manifestant
ainsi son soutien à l’autoritarisme et l’arbitraire judiciaire qui
empêchait le peuple de décider pour qui voter et pour lequel le juge
Moro était l’un des principaux agents du coup d’État institutionnel.
Pour sa part, le juge Sergio Moro est également entré dans le jeu
électoral pour favoriser le candidat d’extrême-droite. Ce lundi, il a
révélé une déclaration d’un ancien ministre de Lula et de Dilma
Rousseff, Antonio Palocci. Dans ce document, il est affirmé que l’ancien
président lui avait demandé « d’utiliser des ressources illicites »
dans les campagnes de Dilma.
Ce magistrat, responsable de l’emprisonnement de Lula lui interdisant
également d’être candidat a donc publié à moins d’une semaine du
premier tour une déclaration de Palocci, moyen pour ce juge proche de
l’Ambassade et du département d’Etat Américain de participer dans la
manipulation de ces élections. Or, ce document n’apporte aucune preuve
et avait été rejeté par le ministère public. Néanmoins, il est possible
que de telles déclarations affectent la candidature du PT.
De plus, alors que le candidat du PT, Haddad, fait des appels au PSDB
à s’unir face à Bolsonaro en voulant transformer la haine de Bolsonaro
en un pacte avec la droite putschiste plusieurs alliés du candidat à la
présidence pour le PSDB, Geraldo Alckmin, ont commencé à exprimer leur
soutien de manière plus ou moins explicite notamment au travers de
déclarations sur les réseaux sociaux.
Les gestes du candidat du PT à l’égard du « grand centre » peuvent
aussi être en train de jouer contre lui. En effet, un secteur de
l’électorat rejetant les politiciens traditionnels pourrait commencer à
le voir comme « le candidat de la classe politique traditionnelle ».
Dans ces cordonnées, si les tendances exprimées par les sondages se
confirment, une victoire de Bolsonaro au second tour de la
présidentielle (pour certains il y a même des possibilités d’une
victoire dès le premier tour) n’est nullement à exclure. Un scénario qui
pose des dangers importants pour les travailleurs et les classes
populaires.
C’est dans la rue que l’on combat l’arbitraire du pouvoir judiciaire et l’extrême-droite
A tous ces gestes en faveur de Bolsonaro de la part de certains
secteurs des classes dominantes, il faut ajouter le fait que
l’acharnement du pouvoir judiciaire contre Lula continue : ce n’est que
cette semaine que l’ex-président a été autorisé à concéder une
interview, en même temps que l’on vient de lui interdire de voter
dimanche prochain.
Cependant, la stratégie du PT de conciliation avec une partie des putschistes
est complètement impuissante pour faire face à l’arbitraire judiciaire
et à l’extrême-droite. Pire encore, sa politique de conciliation et de
soumission aux intérêts des capitaux internationaux ne peut que
renforcer les tendances réactionnaires à la Bolsonaro.
Haddad est en train d’essayer de donner des gages « de bonne
conduite » aux marchés, ce qui impliquera inévitablement des attaques
contre les travailleurs et les classes populaires. Cela est un danger
non seulement pour les conditions de vies des masses mais également un
danger politique pour les travailleurs brésiliens.
En effet, malgré le fait que le cœur de l’électorat de Bolsonaro soit
la petite-bourgeoisie aisée des grandes villes radicalisées à droite,
les idées réactionnaires de Bolsonaro sont en train de pénétrer aussi
dans les couches les plus conservatrices du prolétariat. Même en cas
d’une éventuelle victoire du PT, une politique pro-patronale de ce
dernier pourrait renforcer l’extrême-droite parmi cette population.
C’est pour cela que pour les travailleurs et les classes populaires
du Brésil il s’agit de rejeter dans les rues, dans les lieux de travail
et d’étude la démagogie réactionnaire de Bolsonaro, un vrai danger pour
les masses, mais en même temps développer leur mobilisation de façon
indépendante du PT qui se prépare à gouverner avec la droite en cas de
victoire et en suivant les diktats des capitaux internationaux et du
FMI.
Cette indépendance vis-à-vis des différentes variantes bourgeoises et
des conciliateurs du PT est encore plus importante en cas de victoire
de Bolsonaro, ce qui sera accompagné d’attaques contre les libertés
démocratiques mais aussi contre les conditions de vie et les droits de
la classe ouvrière.
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