Le
président Donald Trump essaie d’exploiter la rivalité réactionnaire
entre l’Arabie saoudite et l’Iran pour atteindre les objectifs de
l’impérialisme nord-américain dans la région, notamment en Syrie.
Pour son premier déplacement à l’étranger en tant que président
des États-Unis, Trump a décidé de faire une tournée à l’image de son
gouvernement : profondément réactionnaire. Elle a commencé en Arabie
saoudite, puis en Israël et s’achèvera en Cisjordanie, où il rencontrera
Mahmoud Abbas, président de l’Autorité palestinienne.
Mais malgré la multiplicité de destinations, le discours était
clair : lutter contre le terrorisme et contre l’Iran. Ainsi, devant les
représentants de cinquante pays musulmans, alliés du royaume saoudien,
Trump a pris des accents de l’ancien président George W. Bush et a
déclaré que l’on se trouvait dans une « lutte contre le Mal ». Ensuite, il s’est attaqué directement à l’Iran, l’accusant d’être « responsable de l’instabilité dans les pays arabes », et invitant ces derniers à « isoler l’Iran ».
En Israël, Trump a rappelé les liens « indissolubles » qui
lieraient l’État sioniste et les États-Unis et s’est attaqué encore une
fois à l’Iran, déclarant que Téhéran ne devrait pas se munir de l’arme
nucléaire et répétant que le pays perse était à la base de beaucoup
d’instabilités dans la région.
Pour le moment, il n’y a pas eu de réponse officielle du gouvernement
iranien face à cette offensive verbale de la part de Trump, en rupture
avec la politique de « rapprochement » défendue par Barack Obama.
D’ailleurs, ces déclarations de Trump ont lieu au moment où Hassan
Rouhani, président iranien « modéré », a été réélu à la tête du pays.
Qu’est-ce que Trump et son gouvernement recherchent avec ces attaques
contre l’Iran ? Depuis plusieurs mois, l’administration Trump a
démontré qu’elle entend se débarrasser de Daesh en Syrie. Évidemment, ce
n’est pas une victoire contre Daesh qui va mettre fin aux groupes et
organisations islamistes radicales, ni aux attaques terroristes, et
encore moins mettre fin aux conflits armés qui ravagent la région. Mais
cela pourrait permettre à Trump de renforcer sa position aux États-Unis,
où il fait face à de multiples oppositions.
Au contraire de ce que ses discours laissent entendre, Trump n’a pas
intérêt à mettre fin à l’accord sur le nucléaire iranien. Cependant, il
doit restreindre le pouvoir de négociation avec les puissances
occidentales et l’influence iranienne dans la région. Et cela pour des
questions stratégiques : pour vaincre Daesh, Trump a besoin du soutien
actif d’acteurs régionaux ; l’Iran n’est pas un partenaire fiable et
donc il doit s’appuyer sur les alliés historiques des États-Unis dans la
région, notamment l’Arabie saoudite.
Comme affirmé dans un article récent de Stratfor : « l’actuelle
position dure du président [Trump] face à l’Iran crée une situation
plus propice à faire appel à l’aide de ses alliés sunnites – les
adversaires de Téhéran. Ces derniers mois, la Maison-Blanche a poussé
ses partenaires du Moyen-Orient, dont l’Arabie saoudite, la Turquie,
l’Égypte et la Jordanie, à renforcer leur rôle dans la lutte en cours
contre l’État islamique. Bien sûr, Obama s’est efforcé de faire de même,
mais il lui manquait une cause commune, que l’hostilité de Trump envers
l’Iran a créée, entre ses rivaux sunnites et l’administration
états-unienne. Alors que les liens de Washington avec ces États se sont
réchauffés, ils se sont montrés plus disposés à se coordonner avec les
États-Unis ».
Ainsi, l’administration Trump est en train de revenir à une politique
de soutien ouvert à l’Arabie saoudite face à l’Iran, dans leur dispute
réactionnaire pour le leadership de la région, et continue d’attiser les
frictions entre les deux pays. Certains analystes vont même jusqu’à
pointer le risque d’affrontement armé direct entre les deux puissances
régionales. En ce sens, il n’est pas étonnant que pendant sa visite,
Trump ait promu la signature d’accords de vente d’armements
nord-américains au royaume saoudien pour une valeur de 110 milliards de
dollars.
Ce sont ces mêmes armes qui servent aujourd’hui l’Arabie saoudite à
martyriser le peuple yéménite dans une guerre brutale pour réinstaller
son allié au pouvoir contre la rébellion Houti soutenue par l’Iran. Une
guerre sauvage qui plonge des millions de personnes au bord de la
famine, qui en tue de centaines d’autres par des maladies comme le
choléra, mais que Trump a validée, affirmant qu’elle s’inscrit dans la
lutte « contre le terrorisme ».
Cependant, ce tournant pro-saoudien et anti-iranien pourrait aussi
avoir des conséquences pour les États-Unis dans la région, notamment en
Irak. En effet, en Irak, où l’Iran a gagné une grande influence depuis
l’échec catastrophique de l’intervention américaine, les États-Unis et
ses alliés cherchent à reprendre Mossoul des mains de Daesh. Il est
encore trop tôt pour dire quelles seront les conséquences de ces
tensions renouvelées quant à la coopération des alliés de Téhéran avec
les occidentaux. En Syrie, la même question se pose à propos de
l’offensive sur Raqqa.
La politique de Trump, comme celle de ses prédécesseurs, se révèle de
plus en plus dangereuse pour les populations du Moyen-Orient. Non
seulement elle consiste à soutenir des régimes profondément
réactionnaires, mais elle continue d’attiser des rivalités qui ne
représentent en rien les intérêts des travailleurs et des couches
populaires.
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