Alors
que la centrale a soutenu absolument toutes les contre-réformes du
gouvernement Hollande, maintenant elle appelle à voter Macron pour faire
face au danger FN. La colère face à ce cynisme n’est pas surprenant.
Philippe Alcoy
Au soir du premier tour de l’élection présidentielle la CFDT, dirigée par Laurent Berger, appelait, dans un communiqué, « dès
maintenant toutes celles et tous ceux qui sont attachés à notre
République à se mobiliser pour battre la candidate du Front National,
dimanche 7 mai et donc à voter Emmanuel Macron ». Pour justifier cet appel la centrale déclare se battre « contre le totalitarisme, la xénophobie et le rejet de l’autre ».
Donc, le candidat des banques, du capital financier, celui qui promet
de libéraliser l’économie en s’attaquant non seulement aux conditions
de vie et de travail des classes populaires mais même aux droits
syndicaux, serait devenu le nouveau rempart contre, ni plus ni moins, le
« totalitarisme ».
Or, ce sont précisément les attaques contre les travailleurs et les
classes populaires menées par les partis néolibéraux (de droite comme de
« gauche ») depuis plusieurs décennies qui ont préparé le terrain pour
le renforcement du FN. Ce sont aussi les attaques de patrons, de leurs
représentants politiques et des institutions de l’État contre les
militants syndicaux combatifs, associatifs et politiques, qui ont permis
d’affaiblir les travailleurs et leurs organisations.
Mais ce sont aussi les trahisons des directions syndicales qui ont
négocié le poids des chaînes qui ont servi pour museler la résistance
des travailleurs et de la jeunesse, pour précariser leurs conditions de
vie et de travail qui ont également « fait le lit » de la montée du
parti de la famille Le Pen.
Et la direction de la CFDT a joué un rôle néfaste sur ce point-là. Sa
politique de « collaboration de classe », en accord avec le patronat et
les gouvernements, sur le dos des travailleurs, a été désastreuse pour
l’unité de notre classe dans les luttes. Les cinq dernières années sous
le gouvernement Hollande ne sont en ce sens que l’expression la plus
aboutie, la plus explicite de cette politique mise ne place depuis des
décennies.
Dans ce contexte, il n’est pas étonnant que la déclaration de soutien
au candidat néolibéral ait provoqué la colère de certains militants.
Ainsi, des vitres ont été cassées dans le local parisien de la CFDT à
Belleville et un tag a été fait où on peut lire « Mort aux collabos ».
La centrale compte porter plainte.
En effet, si l’on doit tirer une première leçon du premier tour des
élections présidentielle c’est qu’il y a eu un clair rejet des partis
dits « traditionnels », du bipartisme à la française, de leur régime.
Mais dans ce régime rejeté massivement, il n’y a pas que les partis
politiques, il y a aussi les différentes institutions perçues comme
complices et évidemment ces directions syndicales qui ont trahi les
luttes ces dernières années.
Le soutien à Emmanuel Macron de la part de la CFDT réveille
effectivement une colère totalement compréhensible. Car il s’agit d’un
soutien non seulement à la continuité des politiques anti-populaires,
mais aussi à l’aggravation de ces politiques. Et le tout sous prétexte
de « défense des valeurs de la République ». Or, ce sont avant tout ces
politiques néolibérales qui tuent des dizaines de personnes chaque année
dans les lieux de travail, qui provoquent des maladies
professionnelles, qui détruisent notre santé physique et mentale, qui
jettent la jeunesse dans la précarité et le chômage. Oui, c’est
totalement compréhensible que des gens en veuillent à ces dirigeants.
Mais si cette colère est compréhensible, ce ne sont évidemment pas
des actes de ce type qui permettront aux travailleurs de se doter de
syndicats qui défendent réellement leurs intérêts, de chasser de la tête
des organisations ouvrières ces dirigeants complètement « vendus » au
capital et aux gouvernements, soutiens ou complices des attaques contre
les salariés et les classes populaires. Au contraire, c’est
l’organisation des travailleurs à l’intérieur de ces syndicats, opposant
une ligne d’indépendance de classe, démocratique et anti-bureaucratique
aux directions conciliatrices qui permettra de changer cette situation.
C’est une question fondamentale pour le mouvement ouvrier et non
seulement pour les syndicalistes sincères au sein de la CFDT. Les
dirigeants conciliateurs sont, malheureusement, dans toutes les
organisations syndicales. Mais les syndicalistes combatifs aussi. C’est
l’action en commun des syndicalistes, des salariés non syndiqués et de
la jeunesse précaire qui permettra de reprendre les syndicats des mains
de ces dirigeants conciliateurs qui trahissent les luttes et deviennent
un obstacle pour lutter efficacement contre les idées nauséabondes du FN
et contre les attaques du patronat.
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