Philippe Alcoy
Le gouvernement roumain vient d’annoncer la prochaine adoption de
deux ordonnances permettant notamment de « blanchir » les politiciens
condamnés ou poursuivis pour corruption. Sous prétexte de surpopulation
carcérale, la coalition gouvernementale dirigée par les
sociaux-démocrates avec les libéraux et le parti de la minorité
hongroise souhaite gracier les personnes condamnées à des peines de
moins de cinq ans, sauf pour les récidivistes, les personnes ayant été
condamnées à des délits avec violence, des délits sexuels et des délits
de corruption. Une réduction de peine est également envisagée pour
d’autres cas.
Mais l’ordonnance qui a provoqué le plus de rejet de la part de la
population est celle prévoyant une modification du code pénal
décriminalisant certains délits, comme le conflit d’intérêts ou l’abus
de pouvoir. C’est précisément cette modification qui pourrait profiter à
beaucoup de politiciens roumains (de tous les partis politiques)
condamnés ou poursuivis en justice.
Le gouvernement lui-même est composé d’une myriade de politiciens qui
traînent « des casseroles ». L’exemple le plus notoire est celui du
chef du parti social-démocrate, Liviu Dragnea, condamné à deux ans de
prison avec sursis pour avoir organisé une fraude électorale en 2012, ce
qui l’a empêché de postuler au poste de premier ministre. Certains
analystes estiment que cette mesure a été prise pour que Dragnea puisse
être blanchi et devenir premier ministre.
C’est contre cette « corruption décomplexée » que 25 000 personnes se
sont mobilisées dans tout le pays. Parmi les manifestants se trouvait
le président roumain (centre-droite), Klaus Oihannis, qui essaye de
capitaliser le mécontentement populaire à son profit et en même temps de
relégitimer la figure présidentielle en se présentant comme garant d’un
soi-disant « Etat de droit ». Ainsi a-t-il décidé de déclencher la
procédure pour organiser un référendum sur la question au printemps. Le
gouvernement parle de « tentative de coup d’Etat ». Il s’agit clairement
d’une déclaration de guerre entre le gouvernement récemment élu (en
décembre dernier) et le président. Une autre manifestation a été
annoncée pour le week-end prochain.
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