Philippe Alcoy
Publié le 6 janvier 2016
Lundi dernier, le gouvernement grec a envoyé son projet de réforme
du système de retraites aux représentants de la Troïka. Loin de sa
rhétorique anti-austérité d’antan, Syriza au pouvoir depuis presque un
an révèle aujourd’hui ouvertement sa soumission aux diktats des
créanciers du pays. Le déboursement d’une nouvelle tranche du troisième
plan de « sauvetage » de la Grèce dépend d’un accord sur les retraites,
que le gouvernement entend « respecter[...]à la lettre ». Et les
créanciers demandent toujours plus…
Selon les informations qui ont fuité dans la presse, le
projet du gouvernement Syriza-Anel, qui sera voté le 15 janvier au
parlement grec, propose de plafonner les retraites à un maximum de 2300
euros mensuels et à 3000 euros mensuels pour les personnes cumulant plus
d’une pension. Il est stipulé également d’augmenter les cotisations
patronales de 1% et celle des salariés de 0,5%. D’autres pistes sont
également examinées comme l’introduction de taxes aux transactions
bancaires. L’objectif du gouvernement est de faire 600 millions d’euros
d’économies.
Ces mesures, d’après les représentants du gouvernement, seraient prises pour « éviter l’effondrement » du système des retraites car sans l’adoption d’une telle réforme les bailleurs de fonds étrangers cesseraient de financer le pays. Or, ces mêmes bailleurs sont déjà en train de dire qu’ils ne sont pas d’accord avec le projet de Syriza et exigent plus. Pour eux, les retraites du privé devraient être limitées à 1800 euros par mois, celles du public ne pas dépasser 1300 euros ; il faudrait « inciter » les salariés à travailler jusqu’à 71 ans ; il faudrait également les « inciter » à adhérer davantage à des fonds de pension privés. Il y a un différend également sur le fait d’augmenter les cotisations patronales et des salariés car cela pourraient ralentir encore plus l’économie. De nouvelles coupes dans les retraites seraient ainsi « inévitables ».
Les négociations s’annoncent donc difficiles d’ici la fin du mois quand le programme de « sauvetage » sera révisé et la Troïka décidera du déboursement d’une nouvelle tranche du prêt.
Quant aux partis d’opposition, pour le moment aucun ne soutien la
proposition de la majorité… Une toute petite majorité d’ailleurs (153
députés sur 300). De façon complètement hypocrite, le chef provisoire de
Nouvelle Démocratie, Yiannis Plakiotakis, en pleine crise de
succession, demande au gouvernement : « pourquoi il n’a pas appliqué un
grand nombre des promesses comme l’abandon du mémorandum (…) pourquoi
ils n’ont pas restauré le salaire minimum à 751 euros par mois ? ».
En réalité il s’agit d’une manœuvre de distraction. Nouvelle Démocratie (et le PASOK) eux-mêmes ont appliqué par le passé des mesures très dures contre les classes populaires. Et aujourd’hui, ne nous trompons pas, ils ne sont pas en train d’adopter une ligne de « gauche », leur opposition au projet du gouvernement vise à faire pression pour que celui-ci s’aligne d’avantage sur les positions de la Troïka.
Malgré ces différends entre le gouvernement Syriza-Anel et les créanciers de la Grèce, qui existaient aussi quand la droite et le PASOK étaient au pouvoir, il est très peu probable (voire impossible) que l’on voit se répéter le « psychodrame » de l’année dernière où Tsipras avait finalement capitulé sur toute la ligne face à la Troïka. Syriza depuis l’été 2015 a adopté ouvertement une politique pro-austérité et antipopulaire. Ce qui est en jeu aujourd’hui c’est de savoir s’il faut couper au massicot ou à la hache les maigres revenus des classes populaires.
Source: RP
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