Philippe Alcoy
Publié le 18 novembre 2015
Le Comité Confédéral National de la CGT vient de publier une déclaration
face à la situation ouverte par les attentats. Dans celle-ci la
centrale de Montreuil se prononce ouvertement contre la guerre, contre
les amalgames racistes, pour la solidarité internationale et pour la
poursuite des luttes. Une prise de position qui pourrait devenir un
point d’appui fondamental pour le mouvement ouvrier, la jeunesse et les
classes populaires.
Contre la guerre
Ainsi, on y trouve une condamnation des attentats en France mais aussi de ceux qui ont eu lieu récemment dans d’autres pays : « Les
attentats qui ont touché la France, frappent les populations partout
dans le monde, comme à Beyrouth et en Turquie dernièrement, ou lors de
l’explosion de l’avion russe. Notre solidarité s’adresse à toutes les
victimes de ces assassinats ».
Mais face à ceux qui verraient dans cette situation qu’une réponse belliciste contre Daesh, la déclaration est claire : « La
guerre ne règle rien, au contraire. Les lieux de tensions et conflits
se multiplient avec leurs cortèges de morts, de destruction, de
désolation et de haine. Les multiples interventions militaires (en Irak,
en Lybie, en Syrie, etc.), loin d’instaurer la démocratie ont généré un
appauvrissement des populations avec des centaines de milliers de
victimes et une impasse économique et sociale. C’est le terreau sur
lequel le terrorisme se développe, poussant des populations entières sur
le chemin de l’exil ».
Contre les amalgames et le racisme
La centrale de Montreuil dénonce également les tentatives d’attiser
la xénophobie et le racisme en se servant du prétexte des attaques : « [La
CGT] s’insurge contre l’invitation du Front National à l’Elysée. Elle
refuse toute stigmatisation des étrangers et amalgame entre immigration
et terrorisme ». Et plus loin la déclaration pointe le double
discours de la France dont l’industrie de l’armement profite de la vente
d’armes : « Il faut d’ailleurs souligner que l’Etat français est le 2ème pays vendeur d’armes au monde ».
Dans un contexte où le PS, Les Républicains (LR) et le FN se trouvent
dans une sorte de course pour voir qui est le plus répressif, le plus
guerrier, cette déclaration de la CGT (principale centrale syndicale du
pays) laisse entrevoir que ce tout-répressif ne fait néanmoins pas
consensus chez les travailleurs, et ce malgré le contexte marqué par
l’émotion, la peur et le chantage à l’union nationale.
En effet, pour le moment, les réactions de la population semblent
être plus nuancées et moins enthousiastes pour reproduire cette « unité
nationale » de janvier dernier. Plusieurs facteurs pourraient peut-être
l’expliquer : le contexte de retour partiel de la colère ouvrière autour
des évènements d’Air France, l’expérience faite partiellement par une
partie de la population avec la manipulation de « l’émotion nationale »
après les attentats de Charlie Hebdo et l’Hyper-Cacher ; les liens plus
explicites entre les attentats et la guerre en Syrie, entre autres.
La déclaration a certains points problématiques aussi. Par exemple,
tout en dénonçant la « restriction des libertés individuelles et
collectives » on y affirme que la CGT est « favorable à un renforcement de la sécurité et des libertés des citoyens », ce qui implique « des moyens et des effectifs de police et gendarmerie supplémentaires ». Sur le plan international, vis-à-vis de la guerre en Syrie, la CGT se prononce pour « que la priorité soit donnée à la recherche de solutions multilatérales dans le cadre de l’ONU », restant dans un cadre tout à fait dominé par les puissances impérialistes.
Pas de trêve sociale
Cependant, en général il s’agit d’une déclaration qui peut devenir un
appui très important pour des luttes en cours comme celle des salariés
d’Air France mais aussi dans d’autres secteurs. En ce sens, la
déclaration affirme qu’il faut poursuivre les luttes : « Après le
temps du recueillement, les rendez-vous revendicatifs et mobilisations
programmés doivent avoir lieu en travaillant des modalités permettant
d’assurer la sécurité des salariés. Pas plus qu’il n’y a de
trêve dans les attaques contre le monde du travail, il n’y aura de trêve
dans l’action syndicale pour le progrès social ».
Dans ce cadre là la déclaration finit par l’appel à une « journée
d’action » le 2 décembre prochain sous le mot d’ordre de « NON à la
violence sociale ». C’est aussi le jour prévu pour le jugement des
salariés d’Air France pour « l’affaire de la chemise ». Le contexte
ouvert par les attentats impose d’ajouter à cela un clair contenu
anti-guerre ainsi qu’une exigence de la levée immédiate de l’Etat
d’urgence.
Quoi qu’il en soit, cette déclaration de la CGT représente une brèche
très importante dans le « consensus national répressif » et un point
d’appui pour le mouvement ouvrier, surtout si la CGT s’adresse sur ces
bases à l’ensemble des organisations du mouvement ouvrier de façon à
construire une mobilisation à la hauteur des enjeux.
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