Philippe Alcoy
Publié le 20 novembre 2015
« Les chiens aboient !
Les chiens aboient !
La caravane passe…
La caravane passe…
Elle n’a pas le temps de ralentir
Tu peux continuer à me trahir
Je sais que je vais mourir
Mais de ma tombe je vais te haïr
Oui de ma tombe je vais te haïr »
Les chiens aboient !
La caravane passe…
La caravane passe…
Elle n’a pas le temps de ralentir
Tu peux continuer à me trahir
Je sais que je vais mourir
Mais de ma tombe je vais te haïr
Oui de ma tombe je vais te haïr »
Alpha Blondy, « Les chiens ».
La chienne Diesel est morte. « Morte en héroïne » d’après certains. Ils étaient 35.000 à avoir signé la pétition demandant que la « chienne flic »
 soit récompensée avec une médaille posthume. Le hashtag #JeSuisChien 
était en Trending Topic mercredi sur Twitter. La Russie a même 
communiqué ses condoléances et a offert un chiot à la France pour 
compenser la perte de Diesel.
En effet, on est mercredi. Les forces spéciales lancent l’assaut 
contre les supposés commanditaires des attentats de vendredi 13. La 
chienne d’assaut du RAID est envoyée tâter le terrain et fonce dans 
l’appartement où se retranchaient les djihadistes. Mais elle sera 
abattue sur le coup.
Une situation surréaliste. Beaucoup de débats ont eu lieu sur les 
réseaux sociaux. Certains revendiquent Diesel. D’autres considèrent un 
manque de respect vis-à-vis des victimes humaines lors des attentats. 
D’autres encore ont préféré traiter de façon humoristique la question. 
C’est ainsi que des photos d’Abu Waf Waf, le chien djihadiste, ou du 
chat Abu Miaou revendiquant « l’attentat » contre Diesel ont également circulé sur les réseaux sociaux.

Chiens d’assaut, une arme de guerre
Blague à part, ce débat, ces déclarations et cérémonies autour de la 
mort de la chienne Diesel lui attribuant des caractéristiques humaines 
comme le « héroïsme » (comme si elle en avait conscience) expriment en 
réalité une opération idéologique visant à légitimer et rendre 
populaires les forces répressives de l’État.
Loin de l’image du « chien meilleur ami de l’Homme », du compagnon 
des enfants et cette compagnie parfois fondamentale de personnes 
solitaires et en difficulté comme les SDF, Diesel n’était pas une 
chienne « comme les autres ». Elle constitue en effet une véritable 
arme. Arme d’attaque, instrument de répression.
Ces chiens sont méticuleusement entraînés, strictement sélectionnés. 
Parmi leurs compétences on trouve un « bon mordant », c’est-à-dire 
savoir faire une prise ferme et définitive, ne jamais lâcher, même en 
cas de bruit de voiture, ou de coups de feu ; agressivité « contrôlée et
 dirigée » ; sécurisation du parcours du président de la République ; 
participation aux interpellations à domicile le matin, ou pour des 
forcenés qui « veulent en découdre ». Par contre, ils ne sont pas 
utilisés lors des prises d’otages « afin de ne pas confondre preneur 
d’otages et otages ».
Les exploités ont leurs propres chiens héros : vive Loukanikos !
La pauvre Diesel n’a pas choisi de devenir une arme de la police. 
Cependant, il est hors de question pour nous de nous joindre à 
« l’émotion » après sa mort lors de l’assaut à Saint-Denis.
Mais dans une situation qui relève parfois du surréalisme, voire le 
dépasse, il est bien d’y trouver ses propres repères. En ce sens, nous 
avons beaucoup regretté la disparition en 2014 de Loukanikos, le chien 
manifestant. Il s’était fait remarquer dans la période la plus haute de 
la lutte contre l’austérité et la Troïka en Grèce. La revue 
nord-américaine Times l’a même présenté comme l’une des 
« personnalités » de l’année 2011. Loukanikos était toujours au milieu 
des manifestants, au milieu de la répression, des gaz de la police. Mais
 toujours du bon côté de la barricade. Et cela est essentiel.

 

 
 
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