Philippe Alcoy
Publié le 1er septembre 2015
Source: Révolution Permanente
Le bilan de l’affrontement entre la police et les
manifestants d’extrême droite en Ukraine, lundi dernier, s’est alourdi.
Le ministre de l’intérieur Arsen Avakov a en effet affirmé qu’un
deuxième policier venait de décéder suite à des blessures causées par
l’explosion d’une grenade, au milieu de violents affrontements devant le
parlement ukrainien. Il y a eu, par ailleurs, 140 blessés dont 130
policiers.
La manifestation qui a rassemblé autour de
1.500 personnes avait été convoquée par différents groupes nationalistes
et d’extrême droite, notamment Swoboda. Celle-ci s’opposait à une loi
qui était en train d’être discutée au parlement sur une plus large
autonomie pour les territoires de l’Est du pays dits pro-russes.
Cette réforme a finalement été votée par 265 des 450
députés au parlement. Mais elle devra être confirmée en deuxième lecture
par 300 députés car elle implique une modification de la constitution.
La coalition pro-impérialiste au pouvoir à Kiev s’est
divisée sur la question. Les partis d’extrême droite, mais aussi
l’ancienne première ministre Ioulia Timochenko, s’y opposent. Le
président Petro Porochenko essaye de faire adopter cette loi sous la
pression de ses partenaires occidentaux, notamment l’Allemagne et la
France, qui cherchent à mettre fin au conflit dans l’Est du pays. De
leur côté, les dirigeants des territoires de l’Est considèrent que la
réforme ne va pas assez loin.
Ces affrontements, les plus violents depuis la
répression sanglante de février 2014 qui avait accéléré la chute de l’ex
président Viktor Ianoukovitch, inquiète aussi bien les puissances
occidentales que la Russie. En effet, ils posent une question compliquée
à résoudre pour le pouvoir central : comment contrôler les
ex-combattants d’extrême droite ayant participé aux brigades de
volontaires envoyées à l’Est ? Les images montrent plusieurs
manifestants portant les mêmes boucliers et matraques que les policiers.
C’est d’ailleurs une grenade qui a provoqué les morts et la plupart des
blessés. Un suspect appartenant au parti d’extrême droite Swoboda a été
arrêté par la police, il portait plusieurs grenades dans son sac à dos.
Les différents partis nationalistes ukrainiens et
d’extrême droite apparaissent de plus en plus comme un obstacle pour les
dirigeants impérialistes et ses partenaires locaux pour arriver à un
accord de paix plus stable avec la Russie et les rebelles. En ce sens,
les discours des responsables ukrainiens depuis hier ont un ton ferme
contre les membres de Swoboda, laissant entendre qu’ils pourraient aller
jusqu’à la dissolution du parti et l’emprisonnement de ses leaders.
En effet, ces évènements violents et une opinion
publique qui semblerait de plus en plus favorable à « lâcher » les
territoires du Donbass en échange de la fin de la guerre, pourrait
constituer une opportunité pour les partis libéraux afin d’affaiblir les
organisations d’extrême droite.
Cependant, rien ne peut garantir que le gouvernement
de Kiev arrivera à se débarrasser facilement des groupes néo-nazis et
nationalistes, ni qu’il pourra faire adopter définitivement sa réforme
au parlement. Et même si celle-ci venait à être adoptée, cela ne
signifierait pas automatiquement la fin des hostilités. Les « rebelles »
de l’Est cherchent à avoir une autonomie et un territoire plus larges,
ce qui va dépendre du rapport de forces sur le terrain.
C’est précisément pour éviter que le rapport de
forces puisse se détériorer pour les occidentaux et leurs alliés que
Hollande et Merkel essayent d’organiser dans les prochaines semaines un
sommet avec les autorités ukrainiennes, les rebelles et la Russie.
A tous ces éléments de la situation qui se joue par
en haut, il faut ajouter le risque d’une explosion sociale comme
conséquence de la dégradation de la situation économique et des mesures
d’austérité que le gouvernement et le FMI sont en train d’imposer aux
classes populaires.
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