Philippe Alcoy
A travers le monde, pour des millions de personnes, Paris c’est « la
France », la Tour Eiffel c’est « la France ». La mode, le luxe,
la gastronomie, les intellectuels… Tout cela serait Paris (la France). Cette image
ne s’est pas installée dans l’imaginaire des masses de toute la planète à
partir du néant. Elle comporte, comme souvent pour les images caricaturées, certains
éléments de vérité. Mais elle est en définitive le reflet d’une réalité
incomplète.
Les pouvoirs politiques et économiques parisiens ne se privent évidemment
pas de véhiculer cette image. Car Paris n’est pas simplement la capitale d’un
pays, elle est une « capitale mondiale ». Les enjeux politiques,
culturels et économiques sont énormes. Dans un monde de concurrence, de petites
et grandes guerres, en tous genres, ces « mégalopoles mondiales » se
déchirent entre elles pour attirer les plus importantes manifestations
artistiques, culturelles, politiques, sportives, économiques.
Cependant, il coexiste à Paris d’autres réalités qui sont moins
parallèles que l’on ne pourrait le croire à ce luxe et ce raffinement. Charles De Gaule
Etoile et Barbès sont bien sur la
même ligne de métro. SDF et Fashion Week
partagent les mêmes trottoirs. So Paris…
Certains quartiers populaires de Paris ne seraient pas
« représentatifs » de l’image de la ville que d’aucuns voudraient
donner à l’étranger. Ou peut-être seulement partiellement. En haut il y a
Montmartre, mais jamais on ne descend à la Goutte
d’Or. Château Rouge. Ou peut-être que si. Les « descentes ». Il y
a aussi les « espaces alternatifs » cooptés et aseptisés. Mais pas
tant que ça. Il y a les Puces de Saint-Ouen.
Et voilà que Woody Allen nous présente une « Midnight in Paris »…
Mais que se passe-t-il quand « l’invisible » devient visible,
quand l’implicite demande à s’expliciter ? Que se passerait-il si dans
l’imaginaire collectif, Paris évoquait un kebab, une épicerie « exotique »
ou le vendeur de maïs grillé des les bouches de métro ? Ah vendeur de maïs
grillé… qui s’intéresse à tes sentiments ? Qu’est-ce qui te rend heureux ou
triste ? A quoi tu penses en grillant les épis de maïs ? Comment
es-tu devenu so Paris ?… « Maïs chaud, maïs chaud, maïs chaud »
pour ceux qui n’entrent dans les hôtels de luxe parisiens que pour les
nettoyer.
Mais quelle violence. Surréalisme. Quel heurt à la sensibilité de ceux
qui dorment dans les hôtels de luxe parisiens. Celles que l’on voit sans
regarder ne nous laissent pas fermer les yeux. C’est la Grèce ? C’est la
grève. Le Hyatt Paris-Vendôme c’est
ici ? Les chambres à 16 000 euros sont bien là. Les précieuses montres
aussi (bien que pas pour longtemps apprendra-t-on par la suite). Mais, maïs. Qu’est-ce
qu’une femme de chambre pourrait demander de plus ? I’m a tourist. I’m in Paris.
I want to be happy…
« So Paris... » - Une belle fille, dans un quartier chic, beau geste, on pourrait croire à
une publicité pour un parfum. Personne ne serait étonné d’apprendre que c’est
une photo prise à Paris. Elle colle très bien en effet à une certaine image de
Paris et de la France installée dans « l’imaginaire populaire » à
travers le monde.
« Les sentiments du vendeur de maïs grillé » - Qui aurait cru qu’un jour les vendeurs de maïs grillé deviendraient une
image de carte postale parisienne ?... Bon, en réalité ce n’est pas le cas.
Pourtant ils sont là, ils se fondent dans le décor de divers quartiers
populaires de Paris. Ah vendeur de maïs grillé, qui s’intéresse à tes
sentiments ? Qu’est-ce qui te rend heureux ou triste ? A quoi penses-tu en
grillant les épis de maïs ? Comment toi aussi es-tu devenu so Paris ?
« Le choc des parallèles » - Au 5 Rue de la Paix (sociale), mais également de la consommation (de
luxe), se trouve le luxueux Park Hyatt
Paris-Vendôme. Pour qui veut, la nuit est à 16 000 euros. Surréaliste,
la rencontre improbable (en apparence). Celles que l’on voit sans regarder ne
nous laissent pas fermer les yeux. L’invisible devient visible. La grève des
femmes de chambre impacte et étonne comme la collision de deux parallèles.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire