A l’autoritarisme maintenant s’ajoutent la spéculation et les difficultés économiques qui pèsent sur les plus pauvres.
Depuis quelques jours, la gestion chinoise de l’épidémie de
Covid-19 est présentée par beaucoup comme ayant été « exemplaire ».
Certains nuancent en rappelant les violations aux Droits de l’Homme, en
atténuant cependant leurs conséquences. Et c’est ainsi que les méthodes
les plus drastiques, mais aussi l’incompétence qui les a précèdées, sont
« importées » par des pays développés comme l’Italie ou la France.
Pourtant, maintenant que l’épidémie en Chine semble avoir passé sont pic
et qu’il y a de moins en moins de nouveaux cas, les mécontentements
sociaux commencent à émerger plus ouvertement.
Ainsi, le journal South China Morning Post
rapporte que, la semaine dernière, un groupe de résidents de Yingcheng,
une ville de 600 000 habitants située à une heure de Wuhan, a bravé
l’obligation de confinement pour protester contre les prix élevés des
produits de première nécessité. Tout a commencé quand la police a arrêté
un homme qui vendait des produits à des prix inférieurs à ceux des
réseaux d’approvisionnement officiels. Plusieurs centaines de personnes
se sont rassemblées sur le terrain de basket d’un complexe
d’habitationsl abritant 8 000 résidents. Les personnes interviewées ont
expliqué qu’elles en avaient marre de payer des prix gonflés alors
qu’elles étaient forcées de rester confinées chez elles.
Mais le prix élevé des produits de base n’est pas la seule raison de
mécontentement. En effet, les secteurs ouvriers, les plus précaires,
les petits commerçants sont très fortement atteints par les pertes de
revenus liées aux mesures de quarantaine. Comme l’explique le Financial Times : « La
colère face à la perte de revenus et à l’insécurité de l’emploi
commence à se faire sentir. La semaine dernière, les propriétaires de
magasins ont organisé des manifestations de petite envergure dans au
moins six villes, du nord-est industriel de la Chine au centre
manufacturier de Guangdong, dans le sud (...) Les manifestants ne seront
probablement pas une exception. Les petits commerces familiaux, les
échoppes de rue, les restaurants clandestins et autres petites
entreprises emploient 230 millions de personnes et sont particulièrement
vulnérables aux chocs car ils disposent de moins de capital et sont
moins en mesure d’emprunter ».
Cette situation et ces expressions de mécontentement, dans un pays où
le régime est très répressif, viennent contredire le récit que le
gouvernement chinois essaye d’imposer à propos de sa gestion de la
crise. Une gestion qui, malgré les mesures spectaculaires, a été
catastrophique : tout d’abord les autorités ont essayé de museler les
voix qui avertissaient du danger imminent, en niant même leur existence,
ensuite le gouvernement a opéré un tournant drastique et dramatique
mettant au moins 50 millions de personnes en confinement strict pour
compenser sa négligence criminelle des premières semaines. Aujourd’hui
que l’épidémie semble se calmer et que son épicentre s’est déplacé vers
l’Europe, certains dirigeants chinois vont jusqu’à alimenter des
théories du complot, pour le moins farfelues.
Mais ce qui se passe en Chine doit aussi nous alerter en Europe, et
particulièrement ici, en France, où le gouvernement a décrété des
mesures de confinement laissant beaucoup de flou, et surtout où les
capitalistes des grandes surfaces et des groupes pharmaceutiques
pourraient être tentés de faire grimper les prix face à la forte demande
des personnes qui, inquiètes de la situation, se ruent vers les
supermarchés et les pharmacies. Simultanément, le cours répressif que
prennent les mesures de confinement en France, en réplique de
l’antécédent chinois, ne présage rien de bon, notamment pour les
populations ouvrières, et les quartiers populaires.
Comme l’exemple chinois l’atteste, il est urgent que le gouvernement
interdise toute augmentation des prix des produits de première nécessité
sur l’ensemble du territoire et qu’il assure l’approvisionnement
pendant cette période incertaine qui s’ouvre en France. Mais il est à
craindre qu’il ne soit pas plus enclin à interdire cette augmentation
des prix qu’à interdire les licenciements, comme s’y est refusé Edouard
Philippe lors de son allocution télévisée, à l’issue du premier jour de
confinement.
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