Plusieurs
journalistes ont été agressés par la police lors de la manifestation
parisienne. Le gouvernement de plus en plus autoritaire face à une
contestation qui persiste contre la réforme des retraites.
Alors que jusqu’à présent, les manifestations contre la réforme
des retraites s’étaient déroulées sans trop de répression en région
parisienne, il y a eu ce jeudi un clair tournant dans la politique du
gouvernement et de la police. En effet, pendant la dernière semaine, on
avait constaté une répression policière de plus en plus importante lors
des actions des grévistes de la RATP et de la SNCF, ce qui laissait
présager que le gouvernement commençait à envisager la répression pour
mater la contestation. Et c’est bien ce qui s’est passé. Mais en plus
des grévistes et des manifestants, la répression policière a aussi visé
les journalistes.
En effet, dès le début de la manifestation, on apprenait que Rémy
Buisine, journaliste très connu sur les réseaux sociaux en raison de ses
couvertures en direct de divers évènements et de mobilisations, avait
été arrêté par la police. La raison invoquée par les officiers a été le
port d’un masque pour se protéger des gaz lacrymogènes, un outil
fondamental pour les journalistes voulant couvrir correctement les
évènements en cas de répression, ainsi que pour les manifestants qui
subissent directement ce type d’intimidations violentes. Plus tard,
Buisine informera qu’à cause de cela, il a été arrêté par la police et
retenu pendant 2h30 au commissariat du 11e arrondissement de Paris. Dans
un cas semblable à celui de Buisine, un journaliste de l’agence Line
Press a également été amené au commissariat à cause de son masque pour
se protéger contre les gaz.
Libre à l’instant
après 2H30 sans être libre de mes mouvements après une interpellation
et direction le commissariat du 11eme pour le port d’un masque à gaz.
Matériel saisi par l’OPJ.
J’essaye de rejoindre le
cortège au + vite pour un Live à suivre sur @brutofficiel.
(📸@bi1192)
pic.twitter.com/Nw4mkYLHbP
—
Remy Buisine (@RemyBuisine) January
9, 2020
Jean Segura, photo reporter du collectif La Meute, a également été
durement réprimé. Alors qu’il tentait de photographier une charge
violente de la police, il a été violemment arrêté par la police, au
point de laisser son chapeau et ses chaussures sur place. À l’heure où
nous écrivons ces lignes, Jean est toujours au commissariat. Le
collectif Reporters en Colère appelle à un rassemblement de soutien
demain à 15 heures devant le commissariat du 10e arrondissement (26 rue
Louis Blanc) pour exiger sa libération.
Au moment où Jean a été arrêté, d’autres journalistes, bien
identifiés, ont subi la charge policière, comme on peut le voir sur la
vidéo ci-dessous.
Urgent @REC_Collectif
🚨 plusieurs journaliste frappés par la police dont @SeguraJean1
.
Là ça va trop loin @prefpolice
#greve9janvier
pic.twitter.com/2qR1DVQhhq
—
Taha 📷 (@MTGphotographe) January
9, 2020
Sur les réseaux sociaux, on fait aussi part d’une étudiante en
journalisme, Marie, qui a reçu des coups de matraque sur la tête lui
provoquant des blessures importantes.
🚨 ÉTUDIANTE EN
JOURNALISME MATRAQUÉE À LA TÊTE
Marie, étudiante à l’Academie
@ESJLille
Quelques semaines après l’arrestation de Baptiste et Quentin,
une de nos camarades est encore blessée, informer n’est pas un delit.
@snj_national
@snjcgt
@rec_collectif
@davduf
pic.twitter.com/C3QkLcR4MI
—
BDE Académie ESJ (@BDE_AcademieESJ) January
9, 2020
Tous ces exemples témoignent d’une politique répressive délibérée
visant tout le monde, manifestants comme journalistes, photographes. Ce
n’est pas la première fois que la police et les autres corps répressifs
ont le champ libre pour s’attaquer aux journalistes, notamment à ceux
des médias indépendants. Au cours des mobilisations des Gilets Jaunes,
on a vu des journalistes comme Taha Bouhafs ou Gaspard Glantz être
persécutés dans l’exercice de leur travail ; c’est le cas aussi du
photographe Noman. La plupart de ces journalistes sont d’ailleurs connus
pour dénoncer les violences policières.
A ce propos, la position de la police vis-à-vis de cette claire
entrave à l’exercice de la liberté d’expression et d’information relève
d’un cynisme aberrant. En clair, leur justification de la répression se
base sur le pseudo-argument selon lequel si un manifestant ou
journaliste vient à une manifestation pacifique équipé de masque à gaz,
c’est qu’il entend provoquer des violences. C’est en tout cas ce que le
Syndicat Indépendant de Commissaires de Police a clairement répondu au
journaliste du Monde, Nicolas Chapuis, sur Twitter : « Si la manif est pacifique, aucun risque. Étrange, de venir avec du matériel de guerre [un masque !] sur une manif ».
@nicolaschapuis:
Un masque à gaz est classé A2 en matériel de
guerre.
L’acquisition et la détention sont
prohibées, sauf autorisation.
C’est la Loi.
Si la manif est pacifique, aucun
risque.
Étrange, de venir avec du matériel de guerre
sur une manif 🤔. https://t.co/rS0KhziJTA
—
Commissaires de Police - SICP (@SICPCommissaire) January
9, 2020
Les policiers viennent aux manifestations équipés de masques, de gaz,
de matraques, des grenades, d’armes à feu, de tasers, entre autres ;
ils provoquent (comme on a pu le voir tout au long de la manifestation)
et répriment des manifestants pacifiques, sans aucune raison. Mais en
plus de tout cela, ils s’attendent à ce que les manifestants restent
complètement à leur merci, sans aucune protection minimale.
C’est d’un niveau de cynisme assez incroyable. Et ce discours est
principalement répété dans les hautes sphères gouvernementales et
véhiculé dans les grands médias. En effet, le gouvernement qui n’arrive
pas à convaincre et qui se trouve de plus en plus dans une impasse,
tente de résoudre la contradiction à travers la matraque. C’est dans ce
cadre que la répression aux journalistes est une politique consciente de
la part de la majorité mais aussi des « stratèges » du maintien de
l’ordre au sein de l’appareil policier.
Le gouvernement de Macron a démontré, depuis qu’il est au pouvoir,
que derrière son masque hypocrite, tout sourire, se cache une politique
violemment pro-patronale, et que pour la mener jusqu’au bout, il est
capable d’utiliser la force, et de bafouer des droits démocratiques
élémentaires comme le droit à l’information. Mais en même temps, le
recours à la répression est aussi un signe de faiblesse.
La force et la détermination des grévistes d’aller jusqu’au bout et
d’imposer une défaite à ce gouvernement n’est pas seulement une garantie
pour éviter un recul majeur sur l’aire des retraites, mais aussi une
garantie pour défendre les droits démocratiques, face à l’autoritarisme
d’un gouvernement qui ne représente que les intérêts d’une minorité de
privilégiés.
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