Selon
Bolsonaro, le Brésil est « le pays des droits, la seule chose qui
manque c’est l’emploi ». La suppression du Ministère du Travail en est
une « conséquence logique ». Le FMI s’en réjouit.
Dans une rapide déclaration à la presse, le président élu du
Brésil, Jair Bolsonaro, a déclaré que quand il assumera son poste le 1
janvier, le ministère du Travail pourrait fusionner avec un autre,
annonçant ainsi la suppression pure et simple du Ministère chargé de
garantir les quelques droits que le régime a accordé aux travailleurs au
Brésil.
En supprimant le ministère du Travail Bolsonaro dit clairement qu’il
va gouverner ouvertement pour satisfaire les intérêts du patronat.
L’énorme niveau de travail informel, de travail précaire et de chômage
(autour de 25 millions de personnes) ainsi que les réformes de
flexibilisation du travail ne semblent en effet pas suffisants pour
Bolsonaro et ses « sponsors » du grand patronat.
Selon les informations de la presse brésilienne, le Ministère du
Travail pourrait passer sous la tutelle du « super ministère » de
l’Economie dirigé par l’ultralibéral Paulo Guedes, admirateur des
réformes économiques de Pinochet au Chili durant la dictature. Celui-ci
et son équipe ont déjà annoncé leur volonté d’appliquer une réforme qui
donnerait aux travailleurs le « choix d’adhérer » à un régime de travail
avec plus de droits (« l’ancien ») ou à un autre avec « moins de
droits » en échange d’une paie soi-disant plus importante.
Bolsonaro, la continuité sauvage du gouvernement Temer
Ces mesures s’ajouteraient aux mesures anti-ouvrières déjà prises par
le gouvernement putschiste de Michel Temer qui, entre autres, permet le
recours illimité à la sous-traitance, y compris dans les services
d’Etat, limite le recours aux tribunaux prudhommales, généralise la
primauté des accords directs entre le patronat et le travailleur
individuel, enlève du pouvoir aux syndicats, etc.
C’est en ce sens que l’on peut affirmer que le gouvernement de
Bolsonaro-Guedes sera la « continuité sauvage » du gouvernement
réactionnaire et pro-patronat de Michel Temer. Dire que cette continuité
sera « sauvage » n’est pas simplement une affirmation
« impressionniste », il s’agit d’une réalité très concrète et très
inquiétante pour les travailleurs et les classes populaires.
En effet, si le gouvernement de Bolsonaro comptera sur le soutien
direct de l’autoritarisme judiciaire, toujours prêt à réprimer à l’aide
du code pénal les travailleurs et les jeunes combattifs, il pourra
également compter sur la tutelle et la très forte bienveillance des
forces armées. En ce sens, Bolsonaro pourra imposer de très directes
attaques aux conditions de vie de la majorité de la population avec le
concours de ces secteurs de pouvoir, lui permettant ainsi avoir recours à
la force et à la répression directe si nécessaire.
Lagarde et le FMI se « réjouissent » des réformes annoncées
Dans ce contexte, où les classes populaires risquent de subir une
offensive patronale d’une violence rarement vue au Brésil depuis la fin
de la dictature, mettant en danger non seulement leurs droits sociaux
mais également leurs droits démocratiques les plus élémentaires, le
futur gouvernement Bolsonaro continue à recevoir des « encouragements »
des marchés et des institutions internationales.
Ainsi, la directrice du FMI, ancienne ministre sous le gouvernement
de Nicolas Sarkozy, Christine Lagarde, a déclaré lors d’une interview au
journal Les Echos : « Pour l’heure, le programme du nouveau président
n’est pas encore totalement clair. Mais je me réjouis de ses intentions
d’engager la réforme des retraites que son prédécesseur, Michel Temer,
n’a pu politiquement mettre en œuvre ».
Ce clair message de soutien à l’ultraréactionnaire Bolsonaro
contraste avec tous les discours hypocrites de « l’après-Guerre Froide »
qui identifiaient l’avancée des restructurations économiques
néolibérales avec l’implémentation de régimes « démocratiques ». Avec la
crise économique internationale et la crise du consensus néolibéral,
les classes dominantes, incapables d’imposer leurs pions libéraux
tendent ainsi à envoyer au diable le semblant de soutien à la démocratie
pour passer à la vitesse supérieure dans les contre-réformes
antipopulaires, désormais menées de la main de politiciens
d’extrême-droite.
Mais si Lagarde se garde de mentionner les aspects bonapartistes et
fascisants de Bolsonaro, elle se garde également de dire pourquoi Temer
n’a pas pu appliquer sa réforme des retraites. En effet, en 2017, la
classe ouvrière brésilienne avait réussi à arrêter Temer après avoir
mené la grève générale la plus importante du pays depuis la fin de la
dictature. Seule l’action démobilisatrice des directions syndicales
liées au Parti des Travailleurs de Lula avait alors empêché que le
mouvement n’aille plus loin, imposant une défaite décisive à Temer et au
patronat.
Un événement qui doit nous rappeler que quelle que soit la radicalité
du futur gouvernement Bolsonaro, il devra lui aussi passer par le test
de la lutte de classes. Pour le moment, rien n’indique encore qu’il en
sortira victorieux, à condition que les travailleurs et les classes
populaires préparent de toute urgence les luttes à venir.
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