Cambridge
Analytica, entreprise clé dans la campagne présidentielle de Donald
Trump, a siphonné les données personnelles de 50 millions d’utilisateurs
du réseau social à leur insu pour mieux cibler la propagande du
candidat Républicain. Scandale mondial qui fait plonger Facebook en
bourse. Mais scandale mondial qui en dit long sur le fonctionnement du
système capitaliste.
Il s’agit d’une vaste opération impliquant des entreprises de
soi-disant recherches scientifiques, des firmes spécialisées en
communication et en campagnes électorales. Dès 2013 la compagnie
britannique Strategic Communication Laboratories (SCL) se lance dans le
domaine des campagnes électorales et à travers différents sous-traitants
s’arrange pour récolter les données personnelles d’utilisateurs
Facebook. L’idée c’est de pouvoir établir des profils politiques et
psychologiques pour mieux influencer les choix politiques des personnes.
Pour ce faire, on embauche le chercheur de l’université de Cambridge
Aleksandr Kogan, à la tête de l’entreprise Global Science Research
(GSR), qui se charge de créer une application pour Facebook soi-disant à
des buts scientifiques. Les utilisateurs, connectés à Facebook, doivent
répondre à un questionnaire et sont rémunérés pour y participer. Ainsi,
la société récolte les données de 270000 utilisateurs et, grâce à une
fonctionnalité du réseau social, de leurs contacts. En fin de compte ce
sont les données d’environ 50 millions d’utilisateurs qui ont été
récoltées.
Évidemment, les participants au questionnaire n’étaient aucunement au
courant que leurs données étaient récoltées à des fins politiques, et
encore moins leurs dizaines de millions de contacts qui n’étaient même
pas au courant que leurs données allaient finir dans les mains de cette
entreprise.
La base de données ainsi dérobée a permis à Cambridge Analytica
d’établir les profils politiques et psychologiques des utilisateurs
Facebook pour mieux cibler les clips de la campagne présidentielle de
Donald Trump en 2016 avec qui cette entreprise travaillait. En effet, la
plupart des 50 millions de personnes affectées sont des électeurs et
électrices nord-américains.
Les réactions politiques sont très fortes depuis samedi quand le New York Times et The Guardian
ont révélé l’ampleur de la fraude. Le fondateur de Facebook Mark
Zuckerberg a été convoqué pour s’expliquer devant le Congrès
nord-américain mais aussi par le parlement britannique.
Sur le plan économique la pression sur Facebook est grande également.
Non seulement les actions en bourse se sont effondrées mais Facebook
risque une amende qui pourrait s’élever jusqu’à 2000 milliards de
dollars.
Mais au fond c’est toute la logique business de Facebook qui est en
danger. En effet, le réseau social tire ses milliards de profits
précisément de la vente des données personnelles de ses utilisateurs aux
entreprises commerciales qui ensuite élaborent des publicités ciblées.
Il s’agit d’un coup important à l’image de Facebook sur la question de
la protection des données personnelles.
Depuis plusieurs années on entend des responsables politiques de
divers bords et divers pays expliquer l’importance de la lutte contre
les « fake news » qui manipulent l’opinion et portent atteinte à la
« démocratie ». Sous prétexte de lutte contre les « fake news »
justement, tout un arsenal de lois a été voté pour limiter la liberté
d’expression sur les réseaux sociaux. Les expériences du « printemps
arabe » et des mouvements de contestation des mesures d’austérité en
Europe et aux États-Unis y sont évidemment pour quelque chose : c’est en
grande partie sur les réseaux sociaux que l’information circulait entre
les manifestants, les jeunes et les travailleurs.
Cependant, ce que cet exemple nous montre également c’est qu’il ne
s’agit pas seulement de simples « fake news » qui manipulent les
électeurs, mais que les principaux manipulateurs de l’opinion possèdent
des techniques et des technologies hautement sophistiquées, qui
procèdent à l’usurpation des données personnelles et surtout qu’il
s’agit de grandes entreprises facturant des millions d’euros. Tout comme
la vente de données à des fins publicitaires, la vente de données à des
fins politiques semble être devenue une nouvelle niche pour les profits
capitalistes.
Il n’y a pas de doute que cet événement va être utilisé par les
gouvernements pour accentuer le tournant autoritaire qui a gagné
l’ensemble de la planète et approfondir les restrictions de la liberté
d’information sur le net et notamment de l’expression politique sur les
réseaux sociaux. Ainsi, le journal de la City de Londres, le Financial Times, présentait quelques idées, de celles que les libéraux adorent proposer : « une
façon d’aider à limiter les abus politiques de la plateforme pourrait
être que Facebook refuse le contenu politique payant de tout type, et de
limiter (dans la mesure du possible) la présence d’organisations
politiques sur la plateforme. La mission de Facebook est de « rapprocher
le monde ». Interdire la publicité politique pourrait être un pas dans
cette direction ».
Une « idée brillante » des libéraux qui affecterait principalement
les petites formations politiques, notamment celles défendant les
intérêts des couches populaires, et aucunement les principaux
organisateurs de cette fraude massive au niveau mondial : les
gouvernements pour les riches et les dominant de cette planète.
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