Philippe Alcoy
Si seulement l’Algérie pouvait jouer l’Euro 2016 ! « Impossible ! »,
certains diront, « il s’agit d’un tournoi continental et l’Algérie n’est
pas en Europe ». Or, on peu toujours rêver. D’ailleurs, l’équipe du
Japon n’a-t-elle pas participé de la Copa América 1999 sous
prétexte de promouvoir la Coupe du Monde Japon-Corée en 2002 ? Mais
l’Algérie n’est pas le Japon. Et l’Algérie n’est pas non plus l’Irlande,
ni l’Angleterre ou autre pays européen. Et les supporters algériens ne
sont pas traités non plus comme certains supporters européens. Ni par
les autorités, ni par les médias, ni par la police…
Quand l’Algérie s’était qualifiée pour la Coupe du Monde de 2010 et
puis pour celle de 2014 c’était la fête en France aussi. Au moins, dans
les quartiers populaires habités largement par immigrés, ou des
descendants d’immigrés. Non pas seulement des Algériens. Des gens de
différentes nationalités faisaient la fête. Des sénégalais, des maliens,
des marocains, des tunisiens, des ivoiriens, des personnes venues
d’Asie et de bien d’autres coins de la planète et de France, de
nationalité française ou non, scandaient à l’unisson : « One, Two, Three : Viva l’Algérie ! ». A l’évidence, c’était plus que du foot.
Si l’Algérie jouait l’Euro 2016 je serais pour elle. Parce que c’est
plus que du foot. Car si l’Algérie jouait l’Euro 2016 on aurait eu
droit, comme pour les Coupes du Monde, aux déclarations racistes sur les
potentiels « actes d’incivilité » des supporters algériens. On aurait
eu sûrement droit à des quartiers quadrillés par la police pour « éviter
les débordements ». On aurait peut-être même eu Christian Estrosi qui,
comme en 2014 lors de la Coupe du Monde au Brésil, aurait publié un
décret anti-drapeaux étrangers (visant en réalité le drapeau algérien).
C’est plus que du foot et les vieilles habitudes coloniales ne
partent pas toutes seules. Réprimer les « colonisés de l’intérieur »
c’est un attribut central du racisme structurel en France. Réprimer les
millions de travailleurs étrangers ou descendants d’étrangers (même si
l’on parle de deuxième ou troisième génération !) est central pour le
capitalisme français. Et quand on dit réprimer il s’agit de réprimer
tous les aspects de la vie, même lors des fêtes, des moments de
convivialité.
Et s’il y en a qui ont un doute là-dessus, il suffit de comparer
l’attitude de la presse, du gouvernement et de la police face aux
supporters européens qui, eux aussi, « font la fête » actuellement pour
l’Euro. Le bruit, les rues envahies d’ordures, de bouteilles, les
bagarres et parfois même les actes odieux (comme celui des supporters anglais humiliant des enfants rrom à Lille)…
Aucune de ces « perturbations » liées au tournoi européen ne vont être
traitées avec autant de haine raciste et de volonté de stigmatisation
dans la presse que les « débordements » des supporters algériens.
En attendant le jour où l’équipe d’Algérie jouera l’Euro (et la
gagnera), nous continuerons à soutenir et à nous battre aux côtés de nos
sœurs et frères de classe qui subissent au quotidien le racisme d’un
Etat impérialiste qui a encore du mal à digérer la défaite que le peuple
algérien lui a imposé en 1962 ! Face au revanchisme colonialiste
français nous continuerons à chanter « One, Two, Three : Viva l’Algérie ! »,
jusqu’au jour où on se débarrassera de ces frontières réactionnaires et
on construira une réelle amitié et fraternité entre tous les peuples,
débarrassés de l’oppression impérialiste.
("Norman" résume à sa façon la situation)
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