Le
régime de Pékin tente de renforcer son contrôle autoritaire sur les «
territoires périphériques » ; les États-Unis usent de toute leur
hypocrisie se présentant comme des défenseurs de la « démocratie » tout
en dissimulant ses vraies intentions.
Ce jeudi l’Assemblée Nationale Populaire a voté lors de sa rencontre
annuelle une nouvelle loi de sécurité nationale à Hong Kong. Sur les
près de 3000 « délégués » il y a eu une voix contre et six absentions.
Cette nouvelle loi implique une accentuation du contrôle de Beijing sur
la cité-Etat autonome. Sous prétexte de prévenir et punir tout acte « de
séparatisme, de subversion, de terrorisme et d’ingérence étrangère »,
cette loi permet aux autorités de la Chine continentale de déployer dans
l’ex colonie britannique des forces de sécurité. Une première version
plus détaillée sera présentée dans les prochaines semaines et devra être
promulguée par les autorités hongkongaises, alliées de Beijing.
Cette offensive de la part du régime chinois sur l’un de ses
« territoires périphériques » menace clairement les particularités de
Hong Kong par rapport à la Chine continentale : la liberté de presse, de
réunion, de critique vis-à-vis du pouvoir, entre autres. C’est pour
cela que dès l’annonce de l’intention du gouvernement chinois d’adopter
une telle loi des manifestations ont eu lieu dans la ville. Du côté des
puissances étrangères, les États-Unis en tête, on a dénoncé
hypocritement la « menace contre la démocratie » que constituait cette
décision. Les États-Unis, la Grande-Bretagne, l’Australie et le Canada
ont ainsi déclaré que Beijing serait en train de rompre ses engagements
internationaux contenus dans son accord avec l’impérialisme britannique
quand celui-ci a « rétrocédée » Hong Kong à la Chine après une longue
période de domination coloniale.
Les raisons internes de l’offensive du régime chinois
Il y a des raisons d’ordre interne et externe qui expliquent la
décision des autorités chinoises, et elles sont liées. Du côté des
éléments de politique interne nous devons mentionner le mouvement de
contestation à Hong Kong déclenché il y a presque un an. Celui-ci avait
commencé face à l’intention du régime chinois d’adopter une loi
permettant le transfert de détenus hongkongais vers la chine
continentale. Cela a cependant ouvert une contestation plus générale du
gouvernement de Carry Liam très liée au pouvoir à Beijing. Bien que les
mesures de quarantaine, entre d’autres facteurs, aient favorisé un arrêt
des mobilisations, la contestation reste forte. Et cela s’est vu en
effet avec la reprise de la contestation, et de la répression, suite à
l’annonce du gouvernement de son intention d’adopter la nouvelle loi de
sécurité nationale.
Comme on peut le lire dans le Washington Post : « Cette
loi est la mesure la plus audacieuse prise par Pékin pour miner
l’autonomie de Hong Kong et constitue une réponse directe aux
manifestations pro-démocratiques qui ont éclaté dans l’ancienne colonie
britannique l’année dernière. Ces protestations entrent dans la
catégorie des activités sécessionnistes et de la subversion du pouvoir
de l’État sous la nouvelle loi ».
Ainsi, le gouvernement chinois avec cette loi tente de passer à un
niveau supérieur de répression pour mettre fin à la contestation
hongkongaise. Mais cette agressivité renouvelée du régime chinois vise
également d’autres territoires « périphériques », à commencer par Taïwan
mais aussi contre les Ouïgours. En effet, plus la Chine est mise sous
la pression de ses compétiteurs externes, plus le régime est mis sous la
pression d’une situation économique dégradée, plus le gouvernement
augmente son discours nationaliste pour consolider un plus fort contrôle
politique et social afin d’écraser toute potentielle contestation.
La pression de la concurrence internationale
Ainsi, nous arrivons aux raisons extérieures qui poussent le
gouvernement chinois à prendre une position plus offensive vis-à-vis de
Hong Kong. En effet, la Chine a en quelque sorte profité d’une période
relativement longue et pacifique de croissance de son économie et de son
influence au niveau international. Avec la dégradation de la situation
économique internationale, accélérée par la pandémie de Covid-19, et
l’accentuation de la concurrence internationale avec d’autres
puissances, notamment avec les États-Unis, on peut dire que cette
période de relative expansion pacifique est finie. Cela implique une
politique plus hostile et agressive des autres puissances à l’égard de
la Chine ; et en même temps cela pousse la Chine à adopter, elle aussi,
une posture plus agressive. La Chine doit alors avoir un contrôle plus
fort sur les territoires que la Chine considère siens et qui pourraient
servir de point d’appui pour l’hostilité étrangère, nord-américaine en
premier lieu, comme le sont Hong Kong et Taïwan.
Comme dit Rodger Baker dans Stratfor : « Compte
tenu des efforts internationaux croissants visant à limiter l’essor
économique et politique de la Chine, Pékin ne peut pas permettre que
Hong Kong, une ville chinoise, reste un défi pour le pouvoir central. La
politique d’un pays, de deux systèmes n’a plus d’écho, et laisser Hong
Kong livrée à elle-même n’aide plus la politique chinoise à l’égard de
Taïwan (...) Et pour le monde, cela signifie que la Chine utilisera sa
puissance politique, économique et, si nécessaire, militaire pour
affirmer sa souveraineté sur sa périphérie, y compris Taïwan et la mer
de Chine méridionale ».
L’hypocrisie occidentale
Les puissances impérialistes occidentales évidemment en train de
profiter pour alimenter leur campagne de ternissement de l’image
internationale de la Chine afin d’endiguer sa progression sur l’arène
mondiale. Les États-Unis sont le pays qui observe la position la plus
hostile à l’égard de Pékin. C’est ainsi que Mike Pompeo, le secrétaire
d’État nord-américain, a déclaré qu’après le vote de cette loi, les
États-Unis ne pouvaient plus considérer Hong Kong comme étant autonome
vis-à-vis de la Chine continentale. « Alors que les États-Unis
espéraient autrefois qu’un Hong Kong libre et prospère servirait de
modèle à la Chine autoritaire, il est aujourd’hui clair que la Chine
façonne Hong Kong », a-t-il dit.
Cette décision du gouvernement nord-américain vise bien évidemment à
faire pression sur Beijing, mais elle pourrait avoir des conséquences
importantes pour Hong Kong elle-même. En effet, cela signifie que la
Cité-Etat pourrait perdre son statut spécial vis-à-vis des États-Unis
qui lui permet d’échapper aux taxes douanières et certaines restrictions
appliquées à la Chine continentale. Cela met en danger la place de Hong
Kong en tant que place financière mondiale.
Bien que pour le moment on ne sache pas exactement quelles seront les
conséquences pratiques de cette décision, il est clair que le
gouvernement Trump devra penser quelles mesures prendre sans que cela
affecte démesurément la population hongkongaise, ce qui pourrait créer
un terrain propice à un certain anti-américanisme. En même temps, le
gouvernement chinois se tient dans une posture feignant être prêt à
« sacrifier » la place financière de Hong Kong ; nous verrons dans les
prochaines semaines jusqu’où iront les deux.
Cependant, ce qu’il est clair c’est que la concurrence entre la Chine
et les États-Unis n’a rien à voir avec la « défense de la démocratie ».
Il s’agit d’une concurrence stratégique sur plusieurs plans liés entre
eux : économique, commercial, militaire, technologique, etc. En ce sens,
même si la Chine était un régime démocratique libéral, la concurrence
entre les deux pays persisterait. Les États-Unis tentent d’utiliser une
énième fois le prétexte de la défense de la démocratie pour atteindre
ses propres objectifs impérialistes. Cette hypocrisie est d’autant plus
évidente quand on pense à différents alliés importants de l’impérialisme
nord-américain dans le monde comme les ultraréactionnaires
pétromonarchies du Golfe.
D’un point de vue de la classe ouvrière, des classes populaires et de
la jeunesse de Hong Kong, tout en luttant pour préserver et élargir les
droits démocratiques et les intérêts de classe, il est fondamental de
s’opposer aux tentatives de manipulation de l’impérialisme
nord-américain qui n’est nullement un allié dans la lutte contre la
bureaucratie de Beijing. En ce sens, leurs principaux alliés sont les
travailleurs et les classes populaires de la Chine continentale.
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