La
coalition occidentale composée par la France, les Etats Unis et la
Grande Bretagne a finalement lancé son bombardement contre le régime
syrien. C’est une attaque plus importante encore que celle de l’année
précédente.
Plus de cent missiles ont été lancés dans la nuit du 13 au 14
avril par la coalition occidentale. Cette attaque visait trois cibles :
deux cibles militaires (des stocks d’armes chimiques) et un centre de
recherche où l’on produirait des armes chimiques. « Nous avons été très précis et la réponse était proportionnée, mais en même temps ce fut une frappe lourde »,
a déclaré le ministre américain de la défense Jim Mattis. La ministre
de des Armées, Florence Parly, a quant à elle déclaré que « c’est la capacité de développer, de mettre au point et de produire des armes chimiques qui est atteinte ».
Cependant, comme l’a confirmé Joe Dunford, chef d’état-major
américain, l’offensive est terminée. Elle était limitée aux armes
chimiques du régime ; une « réponse » ponctuelle à l’attaque
chimique attribué à Assad. Comme l’explique la première ministre
britannique, Theresa May, les bombardements occidentaux ne cherchaient
pas à « intervenir dans la guerre civile. Il ne s’agit pas de changer le régime ».
En effet, Trump, Macron et May ont bien calibré leur attaque pour
éviter de toucher des objectifs militaires russes et iraniens. De cette
façon ils essayent apparaître comme « tenant leurs engagements » (lignes rouges) sans toutefois déclencher un conflit majeur impliquant des puissances telles que la Russie et l’Iran.
Depuis une semaine le ton montait entre les occidentaux et la Russie
et le risque d’un conflit de grande ampleur apparaissait très important,
notamment si la Russie était touchée par l’attaque qui s’annonçait.
Malgré la dégradation des rapports avec Poutine, on ne peut pas exclure
qu’il y ait eu des échanges préalables entre Moscou et les occidentaux
pour éviter le plus possible une escalade.
De son côté le régime assure qu’un « grand nombre de missiles » ont
été interceptés et que les dégâts sont minimums. On dénonce une « agression barbare ». L’ambassadeur de Russie à Washington, Anatoli Antonov, a considéré que les frappes contre la Syrie signifiaient « insulter le président russe » et que de telles actions « ne resteraient pas sans conséquences ». Pour sa part l’ayatollah iranien Khamenei a considéré que « les
Etats-Unis et leurs alliés ne tireront aucun avantage des crimes commis
en Syrie. Attaquer la Syrie est un crime. Le président américain, le
premier ministre britannique et le président français sont des criminels ».
Malgré toute cette rhétorique il reste à voir quelle sera la réponse
du régime et de ses alliés, si elle a finalement lieu. De leur côté une
escalade n’est pas souhaitable non plus.
Les « Faucons » à Washington déçus
Avec cette frappe aussi bien Trump que Macron et May réussissent à renforcer une image de « dirigeants déterminés » à tenir leurs « engagements »
à un moindre prix géopolitique (au moins pour le moment). Cependant,
leur opération pourrait se révéler peu payante d’un point de vue
politique.
En effet, après les frappes nord-américaines en avril 2017, également
en réponse à une attaque chimique attribuée au gouvernement Assad, le
régime syrien n’a nullement été affecté dans sa course meurtrière.
Certains observateurs affirment même qu’il a réalisé d’autres attaques
chimiques depuis cette date, sans trop de réaction des occidentaux.
C’est pour cela que les ailes les plus guerrières à Washington
espéraient que la réponse cette fois soit plus dure et visant plus
d’objectifs militaires, non seulement d’Assad mais aussi de ses alliés,
notamment l’Iran. Et les déclarations de Trump et ses alliés pendant la
semaine laissaient espérer une réponse de ce type.
Cependant, malgré le ton « faucon » de Trump la réponse occidentale a été très « colombe ».
En effet, face aux dangers qu’une attaque plus déterminée et aux
craintes de la France qui voulait éviter de toucher des objectifs
iraniens pour ne pas compliquer les négociations sur le traité nucléaire
iranien, aujourd’hui on constate qu’une ligne moins agressive a été
adoptée.
Comme on peut lire dans le Financial Times : « La
portée limitée des cibles a déçu certains faucons de Washington qui
espéraient que l’intervention américaine marquerait un effort plus large
pour combattre l’influence de l’Iran et de la Russie sur la Syrie.
Behnam Ben Taleblu, de la Foundation for Defense of Democracies, a
déclaré que la sélection des cibles avait montré que l’administration
Trump avait décidé de ne pas défier l’influence de l’Iran en Syrie. ‘La
frappe n’est pas vraiment un signal contre l’Iran, le Hezbollah, les
milices chiites ou la Russie, mais plus pour défendre la norme de ne pas
utiliser des armes chimiques (…) Pour moi, cela signifie que la machine
de guerre conventionnelle d’Assad n’a pas été entravée par la frappe’ ».
Plus encore, les frappes occidentales ne toucheront même pas le moral
de l’armée syrienne ou encore des soutiens d’Assad et ses alliés. Au
contraire, elles donnent l’opportunité à Assad d’apparaitre comme une « victime » et d’adopter une posture cynique « anti-impérialiste ».
Halte à la campagne impérialiste en Syrie ! Stop à la guerre !
La réalité c’est qu’aussi bien Trump que Macron et May visaient avant
tout des objectifs politiques internes. Trump cherche désespérément
améliorer sa popularité d’ici les élections au congrès de l’année
prochaine pour éviter de subir un revers électoral qui ouvre une
importante crise politique dans la principale puissance impérialiste.
Macron quant à lui se trouve au milieu d’une contestation sociale
grandissante à ses politiques antisociales. Face au conflit cheminot et
dans les universités le gouvernement français a en effet opéré un
tournant répressif cette semaine avec l’intervention brutale à Notre
Dame des Landes, la répression accrue dans les universités occupées et
une contre-offensive médiatique face à la grève des cheminots. Tous ces
fronts rencontrent une résistance acharnée de la part de la jeunesse et
des travailleurs. L’offensive en Syrie était supposée renforcer son
image.
Quant à Theresa May, son gouvernement se trouve embourbé dans de
difficiles négociations pour le Brexit et la pression sur elle
grandissante. Avec l’affaire Skripal et le large front de soutien
international qu’elle avait réussi à obtenir elle avait eu une victoire
importante. Logiquement, elle espérait renforcer son image avec cette
offensive impérialiste.
Ces interventions réactionnaires en Syrie des puissances
impérialistes se combinent avec les massacres perpétrés par le régime
d’Assad et de ses alliés. L’aviation meurtrière de la Russie et les
exactions contre les populations civiles des milices chiites financées
l’Iran, notamment le Hezbollah, ont été fondamentales pour le maintien
d’Assad au pouvoir et pour la victoire militaire du régime, au moins
dans la première phase de la guerre.
Dans ce cadre totalement réactionnaire, il est fondamental de
revendiquer le retrait immédiat de toutes les puissances internationales
et régionales impliquées dans la guerre depuis 2011 : les États-Unis,
la France, la Grande-Bretagne, la Turquie, la Russie, l’Iran, l’État
israélien, l’Arabie Saoudite et les monarchies du Golfe.
Pour cela, les travailleurs, la jeunesse et l’ensemble des classes
populaires doivent mettre en place un grand mouvement international, à
commencer par les pays impliqués dans le conflit, pour la fin de la
guerre en Syrie, contre l’intervention de l’impérialisme et de toutes
les puissances régionales et internationales, contre le régime d’Assad
et ses complices. C’est une tâche internationaliste fondamentale pour
les exploités et opprimés.
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